Et si la danse entrait dans notre espace urbain ?
Au nombre de six, elles nous offrent une danse en plein coeur de la ville au moment où on ne l’attend pas ! Un lieu familier que l’on traverse sans s’arrêter vraiment, rarement pour y vivre un moment de poésie contemplative ! La cie Golmus s’en empare avec la danse et c’est beau !
Rencontre avec Martine Sénéchal, chorégraphe et présidente de l’association.


Les danseuses en répétition, 13-01-2019


Tomber sur une performance de danse en faisant son marché, c’est plutôt inédit ! Vous aviez envie de désorienter les passants ?

La rue comme terrain de jeu et non plus un plateau de théâtre !
La première fois que je suis tombée sur une performance dansée en milieu urbain, c’était à Aix-en-Provence, adolescente. Des danseurs dans la célèbre fontaine du cours Mirabeau, sur les capots de voitures…
Ça questionne, on regarde , on est avec eux et on se coupe de l’ambiance urbaine pour être pleinement avec les danseurs…
L’art en espace urbain interroge les conditions traditionnelles de visibilité et d’appréciation de l’art. Il influence les modalités de présence du spectateur dans le champ de la danse et les conditions de réception.
Dans un questionnement des mécanismes à l’oeuvre, je souhaite parler plus spécifiquement des démarches chorégraphiques qui prennent comme point de départ esthétique et pratique l’ensemble des relations humaines qui parcourent les sites urbains, tenant compte du site urbain en tant que contexte social.


Le coeur de ville, ça manque un peu d’art ?

L’art dans la ville, c’est une envie forte de ma part. Nous avions sévi lors du printemps des poètes 2018, sur le thème de l’ardeur. Avec une présence de comédiens dans la rue, nous avions organisé une brigade d’interventions poétiques, en partenariat avec l’Atelier du Coin qui a réalisé pour l’occasion de gigantesques panneaux peints sur le thème, panneaux posés à l’entrée de la ville et au centre de la zone piétonne.

Les danseuses en répétition, 13-01-2019

Les danseuses en répétition, 13-01-2019
Les danseuses en répétition, 13-01-2019


Se produire hors-les-murs, c’est une manière de toucher un public de façon plus inclusive ?

Notre population peut être très présente lors de grandes manifestations populaires mais n’est pas encore très réceptive à l’art dans la rue de manière spontanée et/ou impromptue.
C’est dans ce sens que nous souhaitons faire entrer la danse contemporaine au plus près du public qui ne s’y attend pas !
Ne pas provoquer mais simplement offrir au public une émotion esthétique et artistique…

Vous vous êtes déjà produites une fois ! Comment ont réagi les passants ?

Montceau-les-Mines a vécu une première « parenthèse dansée » fin novembre, jour de marché. Il pleut, des danseuses lisent tranquillement, assisent au pied du kiosque à musique, peu de passants arrêtent leur regard… Puis le mouvement démarre, on envahit l’espace public.
Le passant évite d’abord les danseuses, puis le regard fuit et il continue son chemin. Rue piétonne, puis sur l’esplannade devant l’église, les passants se mêlent aux danseuses sans s’en rendre compte, ou bien accélèrent. Que se passe t-il ?
Cette première intervention se fait dans le silence, avec l’ambiance sonore de la rue. Le passant n’est pas interpelé par de la musique mais uniquement par la présence des danseuses.

Les danseuses en répétition, 13-01-2019
Les danseuses en répétition, 13-01-2019
Les danseuses en répétition, 13-01-2019

La cie Golmus, c’est aussi des lectures, des stages sur la voix, des représentations de théâtre, des ateliers de voix-chant. Avec des intitulés qui ne laissent pas indifférents comme  Les pas comme nous ou Pas comme les autres, et alors ?.
L’art se doit-il de porter une parole invisible ? Est-il forcément politique ?

La danse et le théâtre ont toujours eu pour moi une valeur d’engagement.
En 2015, on a fait une création en soutien au peuple syrien avec 8 adolescentes qui ont dû s’approprier une vie d’adolescente en Syrie, en partenariat avec le Docteur Seddik et l’association Syria Charity.
2016 ? Une balade dansée dans les lavoirs en partenariat avec l’association Les Rats D’ART de Jambles :  « Le Cantique des cantiques », lu et dansé dans l’eau des lavoirs…
La création « Le Cri » Camille Claudel va sortir du théâtre et l’enfermement de Camille Claudel se confrontera à d’autres lieux.


« Les pas comme nous » est une lecture théâtralisée :
Et si les gens normaux n’étaient pas ceux qu’on pense !
Si nous donnions la  parole  aux  bannis  d’hier et d’aujourd’hui, aux  exclus de  tout genre et de tout bord.
Et si nous  réécrivions l’histoire !
Nous ne saurions nous contenter de cette  lente  évolution que saluent les bien-pensants.
Hissons  les bannières et faisons la révolution !

À travers des textes  subversifs,  décalés, émouvants ou drôles, huit lecteurs et chanteurs s’indignent et invitent le public à sortir des sentiers battus de l’indifférence et de l’intolérance envers les « pas comme nous ».
Des textes qui interpellent, questionnent ou peuvent mettre mal à l’aise, mais qui touchent tous les publics.

L’art n’est pas pour moi un divertissement mais doit interpeler ou questionner le public. Si on sort d’un spectacle en ayant à dire simplement « c’était joli ou beau », ça ne m’intéresse guère !

Martine Sénéchal, cie Golmus


Le spectacle vivant est là aussi pour rassembler un public vivant ! Des comédiens et/ou des danseurs vivants, des techniciens vivants, tous de chair et d’os avec des responsabilités.
Je préfère des questions, des émotions esthétiques ! Oui il y a les décors, les lumières, les costumes, la musique… Autant d’apports qui viennent donner de la force aux propos !

La merveilleuse chorégraphe Pina Baush disait  » Dansez, sinon nous sommes perdus.  »
On serait plus heureux si on dansait plus ?

L’acte de danser est devenu un acte que chacun et chacune peut développer sans distinction de corps, d’âge, de culture, de milieu social…
Trop longtemps la danse est restée l’art d’une élite. Sa démocratisation a permis au fil des années une redécouverte du monde du corps dansant.

« Marcher, c’est déjà un acte dansé » à partir de là , tous les corps sont dansants. Et ma démarche a commencé depuis plusieurs années… Mettre en chorégraphie des techniciens son/lumières , des musiciens, des comédiens, et des personnes qui ont juste envie de mettre leur corps en mouvement… Une seule chose me tient à cœur, prendre soin des corps et ne pas les emmener au-delà de leurs limites, connaître et apprendre à connaître l’anatomie de chacun. À partir de là, tout est permis.
Tout est dit dans la phrase de Pina Baush, « Dansez, sinon nous sommes perdus »

Vous souhaitez assistez à la prochaine parenthèse dansée ? Soyez attentifs lorsque vous ferez votre marché le 1er février !

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Crédit Photo : Florent Rhéty et Maëlle Ghulam Nabi