Chaque année en France, 10 millions de tonnes de déchets alimentaires, encore consommables partent à la poubelle*. Et pas moins de 4,7 millions de citoyens ont eu recours en 2018 aux aides alimentaires.** 
Il est temps de rectifier le tir pour que tout le monde mange à sa faim, que le gaspillage cesse et que plus personne ne fouille les poubelles pour survivre…
Si la solidarité et l’anti-gaspillage n’est pas toujours à l’agenda politique, c’est sans compter sur la jeunesse qui s’engage. A Chalon-sur-Saône, quatre étudiants de terminale au Lycée Saint-Charles lancent une cagnotte dans leur ville pour mettre en place un Frigo Solidaire ! Une réponse pour agir sans détour devant l’urgence d’extrêmes précarités.

Le concept du Frigo Solidaire

À l’origine du projet, lancé à Paris, il y a Dounia Mebtoul. Restauratrice et propriétaire d’une brasserie dans la capitale, elle s’inspire de ce concept berlinois qui consiste à mettre un frigo à disposition à l’extérieur de son commerce.
On peut le remplir ou bien se servir. Le commerçant et/ou restaurateur peut y déposer tous ses invendus de la journée et les passants et habitants du quartiers peuvent aussi y placer ce qu’ils s’apprêtaient à gaspiller.
Il y en a déjà une cinquantaine installés en France et plusieurs cagnottes sont en cours.

Dounia Mebtoul, à l’initiative du projet des Frigos Solidaires en France

Questions aux élèves du Lycée Saint Charles [Chalon-sur-Saône], initiateurs de la première cagnotte pour un Frigo Solidaire.

Hugo Boulin, Hugo Croizier, Lilou Dani et Jean Gabriel Dalle.
Les 4 lycéens à l’origine du projet



Le projet est né au sein d’une classe ! Comment ça s’est passé ? Vous avez pu vous appuyer sur la structure du lycée pour agir ?

Pour le Baccalauréat, nous avons pour mission de concevoir ou présenter un projet original. Un membre de notre groupe a entendu parler de l’association Les Frigos Solidaires.
On a eu envie d’installer un frigo solidaire à Chalon, donc ça s’est bien passé. Le lycée est une structure solide car elle nous aide à récolter de l’argent.

Quels sont vos modes d’action au-delà du financement participatif ?

Nous avons mis en ligne une cagnotte et nous avons organisé une vente au sein du lycée de pains au chocolat, de croissants et de boissons dans le cadre « d’un Ptit Déj solidaire ». Nous avons ensuite fabriqué quelques boîtes pour récolter de l’argent à l’aide d’un graphiste, que l’on mettra dans différents commerces.

Lancer une cagnotte pour un frigo solidaire nécessite de s’associer à un commerçant ou à un restaurateur ! Vous en avez trouvé un ? C’était difficile de le.a convaincre ?

Pour réaliser ce projet, nous sommes actuellement à la recherche d’un commerçant à Chalon-sur-Saône. C’est assez difficile de trouver un commerçant acceptant toutes les conditions nécessaires fixées par l’association des Frigos Solidaires mais il y a un réel besoin ici et nous multiplions les contacts pour trouver la bonne personne. 60 frigos solidaires ont déjà été installés et nous espérons que celui de Chalon sera le 61ème !

On vous souhaite vraiment de rassembler les fonds nécessaires pour que le frigo soit mis en place ! Êtes-vous confiants sur le fait que ça fonctionne bien par la suite ?

Nous sommes très confiants sur la suite de ce projet. Nous espérons que nous aurons assez d’argent d’ici la fin d’année pour pouvoir présenter le projet fini.

Il y a énormément de gaspillage alimentaire en France et tout autant de personnes qui sont dans le besoin alimentaire. Votre action tombe sous le sens ! Pourquoi cette logique n’est pas mise en oeuvre de façon massive selon vous ?

Selon nous, cette logique n’est pas mise en oeuvre de façon massive car l’installation de ce frigo est coûteuse, ce sont des particuliers qui proposent ce projet pour leur ville. L’association n’est pas très connue et commence à se développer en France.

Un petit geste peut inspirer une réaction plus répandue ?

Oui, car comme par exemple sur les réseaux sociaux, un simple partage peut être vu par plusieurs personnes qui peuvent le communiquer à leur tour et ainsi de suite, comme le bouche-à-oreille. Le fait d’installer un frigo dans une ville peut montrer l’exemple à d’autres villes pour être mieux vu. Nous aimerions que l’an prochain, d’autres prennent la relève.

Un Frigo Solidaire


L’initiative est très courageuse et pertinente. Mais les réalités du terrain la rendent compliquée à réaliser ! Les quatre lycéens rencontrent des difficultés.
À ce jour, leur cagnotte demeure presque vide et comme ils le précisent, trouver un commerçant ou restaurateur.ice partenaire, ce n’est pas chose aisée.
Pourtant dans leur présentation du projet, Dounia Mebtoul assure que c’est très simple d’installer un Frigo Solidaire.
Pourquoi alors, ici, le projet peine à naître ? Est-ce lié à notre territoire ?

L’installation d’un frigo se fait très rapidement ! 10 minutes et c’est bouclé !
Dans les conditions que le partenaire doit remplir, il y a malgré tout un investissement à prendre en compte, à savoir, contrôler quotidiennement la température du frigo, le rentrer chaque soir pour le sortir au matin, puis vérifier que les règles sont respectées.
En effet, on ne met pas n’importe quoi à l’intérieur ! Il est nécessaire de garder une traçabilité des produits, certains sont à éviter (comme la viande et le poisson, les plats cuisinés où les denrées périmées notamment).
Un frigo coûte 1300 euros, ce qui peut impliquer pour des lycéens de soulever des montagnes !

On a contacté l’association pour demander conseil sur la manière de parer à ces difficultés.
Dounia Metboul nous répond. Elle estime que la zone géographique et la ville dans laquelle on lance l’idée ne sont pas des freins.
Parmi les frigos déjà installés en France, beaucoup sont en zones rurales et dans des petites villes.
Elle insiste sur le fait que le point de départ est de trouver un restaurateur/commerçant. Que ce soutient apporte toujours une certaine notoriété pour débloquer les fonds de la cagnotte !
Dounia précise que de leur côté, ils peuvent donner un coup de pouce au niveau médiatique, notamment par le biais des réseaux sociaux.

Du côté des commerçants et restaurateurs, nous lançons donc un appel !
Êtes-vous prêts à mettre en place un Frigo Solidaire dans votre établissement ? Est-ce trop contraignant ?
Si vous êtes intéressés, faites-le savoir aux étudiants ! (frigos.chalon@gmail.com)

Participer à la mise en place du frigo solidaire en faisant un don ici !

Les Frigos Solidaires : des frigos en libre-service pour les plus démunis – Brut – Février 2018



*En France, le gaspillage alimentaire en chiffre, par Marianne Boyer et Eugénie Dumas le 7/06/2018, article du monde, disponible ici
** 69% des bénéficiaires de l’aide alimentaire en France sont des femmes, Claudia Cohen le 13/03/2019, article sur LeFigaro , disponible ici.

ILLUSTRATION ARTICLE : @MonsieurBMX
Une initiative de Monsieur BMX, un street artiste, qui a récupéré des caddies abandonnés pour en faire des oeuvres solidaires !